samedi 8 mars 2014

Triticum cum laude

Il y a de cela quelques jours, j'ai eu la chance de recevoir une délicieuse surprise organisée de main de maitre par ma chère épouse et quelques amis. En effet, on me fit prendre congé de mon travail pour le vendredi suivant car je devais, ce jour la, changer de profession pour ma plus grande joie. Imaginez donc, on me proposait d'aller travailler toute une journée durant avec l’équipe de Triticum, grands artistes du pain en pays catalan.

Sitôt dit, sitôt fait ! 7h55, et me voici a Cabrera de Mar, équipé d'un simple tablier et débordant de motivation. Mon coach pour la journée s'appelle Robert, il est responsable de l’équipe avec laquelle je vais travailler et son CV ne laisse aucun doute sur ces compétences en la matière. Il m'explique rapidement qu'avant d’intégrer l’équipe il a travaillé chez Turris (autre grand nom du pain de Barcelone) ainsi que chez Oriol Balaguer (éminent pâtissier de la même ville).

 
Tout juste le temps d'enfiler mon tablier, vite remplacé par un accessoire plus approprié, et c'est parti ! Direction le four pour la cuisson des fournées qui ont fermenté toute la nuit dans les chambres de pousse. Le travail consiste a sortir, l'une après l'autre, de grandes plaques (métalliques) d'un chariot rempli de pains sur leur couche, et a transférer les dits pains sur des plaques (en bois celles ci) pour l'enfournement. Pour cela on saupoudre de farine les pains et, a l'aide d'une planchette en bois,  on les "arrachent" a leur couche afin de les disposer de façon homogène sur la plaque de bois. Ni trop proches, ni trop espacés. Les plaques de bois sont ensuite positionnées sur un chariot fixé au sol pour l'enfournement. Je compte rapidement : 9 étages dans le chariot fixe, 2 plaques de bois par étage, entre 8 et 16 pains par plaque selon leur formes = entre 140 et 280 pains par fournée !

Et, selon toute logique arrive le moment de grigner ces jolis pains avant l'enfournement. Je fais du mieux que je peux pour aller vite tout en respectant les consignes de mon maitre mais je me sens lent et pataud en observant le geste sur de Robert qui virevolte d'une plaque a l'autre avec sa lame tranchante comme un rasoir. La pratique ça ne s'invente pas...

La bête !

Robert m'explique le fonctionnement du four et de l'automate qui sert a le charger. Quel monstre ! Un chariot motorisé, équipé de tapis roulants, vient délicatement "attraper" les 200 pains en quelques secondes, recule et dépose le tout dans la gueule béante du four ou pourraient facilement entrer 10 adultes, debout et sans se toucher. Fermeture de la porte, envoyez la vapeur ! 5 secondes de vapeur puis 22 minutes de cuisson pour les pains destinés a l’ultra congélation, 10 de plus pour ceux du jour.
Et pendant ce temps la... (Vous n'imaginiez pas qu'on allait prendre un petit café n'est ce pas ?) il faut enlever les plaques de bois du chariot fixe et mettre des plaques métalliques qui pourront supporter les forts changement de températures de la cuisson jusqu’à la chaine d'ultra congélation. Cela étant fait, Robert me propose de passer dans la salle suivante pour aller rencontrer Marc qui s'occupe de la préparation des pâtes. Chouette ! Des nouvelles recettes, du levain, plein de farines... Allons y !

Pétrins a spirale Bongard et Incubateur a levain, super matos.
Moi qui m'attendais a tomber sur un personnage mystique comme le vieux druide d'Astérix et Obélix, faisant ses dosages a l’expérience, je réalise que l'informatique et les processus qualité sont passés par la et que l'ami Marc suit rigoureusement des fiches imprimées par le département des commandes ou toutes les quantités de la recette sont déjà pré-calculées. Il ne reste qu'un pas a franchir et le dosage des ingrédients pourrait être automatisé !

Bel éventail de farines. Derrière, différents types de graines
qui baignent dans l'eau afin de réduire leur impact sur le
taux d'hydratation de la pâte. Dans les bacs des pâtes fermentées
de la veille qui viendront donner du gout aux pâtes du jour.
On aperçoit la formeuse a baguette dans le fond.
Malheureusement je ne peux pas beaucoup aider Marc, j'observe donc silencieusement le fonctionnement des pétrins a spirales. Ces derniers sont d'une efficacité redoutable et ils permettent un traitement de la pâte comme ni mon robot Kenwood ni mes petites "mimines" ne le pourront jamais :)

Si vous savez pas quoi m'offrir pour mes 40 ans !

Il est maintenant temps de passer a la formation des baguettes, la fiche de commande est formelle : 70 baguettes a préparer. Direction la formeuse au fond de la salle pour la mise en forme des bâtards. L'occasion pour moi de confronter ma technique toute personnelle a celle de Robert et d'essayer tant bien que mal de reproduire ces gestes qui semblent si faciles pour lui et si peu naturels pour moi !

52 cms de longueur, et de jolies pointes qui feront des quignons croustillants... Plus facile a dire qu'a faire. Robert me fait des marques au feutre sur le banc de travail pour la longueur et il me faudra plusieurs dizaines de tentatives avant de prendre le coup de main. Un peu de farine de semoule sur les couches de lin et on aligne les baguettes les unes contre les autres dans les chariots.

Retour au four pour de nouvelles fournées, l'occasion pour moi de manipuler le pain avec une grande pelle en bois pour sortir quelques baguettes a mi cuisson. Ça je sais faire, les séances pizza avec le four a bois de la maison sont utiles :)

Les pâtes du matin sont maintenant prêtes a être formées, nous revenons donc vers le banc de travail et commence un long travail de mise en forme. Des boules, des bâtards, des couronnes, des pains torsadés, des pain roulés dans des mélanges de graines, olives, pains noir.... Tout y passe :) Une petite mention spéciale pour le Roi Marcel avec sa couronne : une boule qui lève dans un banneton rond dans lequel on a placé auparavant une galette faite avec de la farine intégrale. Encore une fois, je ne peux qu'admirer la vélocité redoutable de Robert qui boule les pains deux par deux et prétends même pouvoir en faire trois a la fois...

Tout ce petit monde va maintenant fermenter lentement dans les chambres de pousse jusqu'a la cuisson du lendemain. Il est temps de faire un grand nettoyage puis je rentre chez moi, fourbu mais heureux avec une caisse de bon pain sous le bras.

MERCI !



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